Le Chemin de halage

Première de couverture

Une nouvelle de Denis Tellier 



« On va là dans les tréfonds. De la mémoire, de l’enfance qui surgit dans la narration, dans les mots choisis comme dans les évocations. Et puis le cadre, un paysage que l’on perçoit, on y est, et ces « petites gens », toujours.

Des mots forts, des visions fortes au travers de ce texte qui comme d’habitude avec l’auteur, fourmille de détails, de précisions.

Un texte plein de tendresse, d’humanité, d’humour planqué mais quand même…

Transcender l’âpreté de la vie, dans une sorte de contrepoint qui fait la musicalité de l’écriture de Denis. »

Chantal Flament


Le retour de lecture de Chantal Flament

« Et hop ! Ça commence fort ! D’un petit coup bien placé de patte de chat, vous savez, celui qui chope sa proie en un clin d’œil, Denis Tellier épingle l’art d’aujourd’hui, au travers d’un peintre un peu ronchon, qui peint, mais qui s’en fout… Il peint, c’est tout, comme l’auteur écrit. On fait ce qu’on a à faire. Avant de se retrouver sur le « Chemin de halage », dans un échange des plus hasardeux. Mr Walter, pardon Wouter je vous prie, poursuit son chemin, flanqué d’un monsieur « Ach ché pas », indispensable au dialogue et qui figure décidément ce que j’appelle le contrepoint dans l’écriture de Denis Tellier. Ses réparties, à éclater de rire, donnent le tempo de la discussion, et sont le contrepoint rempli d’humour du cheminement en géographie et en mémoire du narrateur. Mémoire forte, souvent grave mais aussi pleine de tendresse sous- jacente dans l’évocation des petites gens qui font le chemin de halage et constituent un univers que nous découvrons pas à pas. « Ça pourrit pas les souvenirs, les vrais, ça reste là en suspens, c’est comme les moustiques, ça vous repique ». Cet art de dire, ce qui de la mémoire nous a construits, tout en nous envahissant, comme les joncs du bord de l’eau… « Et puis, on avait pas l’espace pour réfléchir trop loin, c’est ça ! Vous savez, il est nécessaire d’avoir des entrebâillements, c’est dans le tout-petit que tout se rétrécit, petit baraquement, petit linoléum, des petits lits, une petite glace, une petite table, des petits mouchoirs, des petits riens en quelque sorte. Il n’y avait pas la place pour une longue conversation. Alors ces gens-là (sic), de voir d’un seul coup une grande armoire, c’était à ne comprendre plus rien. » Tous ces personnages que nous découvrons en marchant avec le narrateur, nul doute que l’auteur les as connus, ça ne s’invente pas tout cela. Qu’ils soient muets, édentés, fatigués, ils sont tous pleins d’une vie et d’une vérité qui dépasse la littérature, univers dans lequel Denis Tellier s’exprime. Ce petit opuscule, qui ne fait que 46 pages, est d’une richesse que n’égalent pas nécessairement beaucoup d’écrits du moment. Chapeau l’artiste et merci. »


et ce retour de lecture de Marie Driot :

 « Une écriture inimitable. Réaliste certes. Mais avec vous, Denis, l’inattendu est souvent tapi à la croisée des chemins, ceux que parcourent vos personnages, supposés « ordinaires », dans une atmosphère de clair-obscur où tout se sait, bien que tout s’y cache.

Un canal de navigation et son Chemin de halage, dans le Nord, une géographie que vous privilégiez. Là où les pensées naissent dans le miroir d’une flaque, à moins que ce ne soit sur un chemin, le long d’une eau où flotte encore le reflet de cheveux blonds sous un ciel d’ardoise. Des bribes d’instants posées là, au gré des rencontres et des pensées sur la vie, ses désillusions ou ses déchirures… Et trois hommes liés aux lieux, chacun à sa manière, dans les errances d’un passé embué de sourde nostalgie.

A vous lire, je ne peux qu’évoquer le précieux triangle unissant celui qui écrit, celui qui lit, et celui qui donne leur existence aux deux autres, le mot. Sans oublier l’encre coulant entre les trois, ce sang de l’écriture. Dans ce texte, la vôtre s’avère tantôt chagrine ou truculente, tantôt lente ou précipitée, mais toujours expressive, nourrie du cheminement des mémoires. Elle y accompagne une quête de sens où se cache une réflexion profonde et essentielle sur les chemins de vie et leurs possibles « croche –pied ». Et vous vous plaisez à incruster des éclairs intenses dans la monotonie ou dans le dérisoire des vies, tout en restant attentif aux lueurs fugitives, aux sautes du vent, comme aux signes du hasard. 

Il me semble parfois qu’il vous suffit d’user d’un porte-plume comme d’une baguette magique pour que jaillisse une eau fraîche dans laquelle s’immergent les sentiments les plus vieux pour en sortir ravivés, métamorphosés. Et qu’ils fondent de toutes pièces un univers, ou qu’ils décrivent une expérience préexistante, les mots conservent chez vous le même degré d’authenticité.

Comme une mosaïque, votre univers est celui de tous les possibles : c’est une histoire qui en ouvre d’autres dilatant le temps et l’espace, c’est un humour qui parfois grince dans les marges, ce sont des récurrences de personnages comme vous et moi, c’est un imaginaire qui suit son chemin avec une aisance apparente et déconcertante, c’est la profondeur qui se cache derrière le sourire, profondeur qui va surprendre le lecteur, voire le toucher en plein cœur. Vous vous employez à monter ou démonter les passerelles d’un temps que vous rendez porteur de possibles, à l’infini. C’est un jeu réjouissant et intriguant, un jeu de l’esprit où vous démasquez jusqu’à l’absurdité des hommes, sans pathétique mais sans désinvolture. C’est ingénieux, ludique ou attendrissant et, dans le même temps, désespéré. Le lecteur progresse un peu en funambule, un peu engourdi, devenu étranger au monde qui l’entoure jusqu’à la chute de la nouvelle.

Kant disait qu’il y a des impératifs en morale – c’est à peu près tout ce que j’ai retenu de lui. Je crois qu’il y a également des impératifs en littérature, des livres qui, par leurs mots, conduisent à un universel. Et lorsque la magie des mots rejoint le plaisir du conteur, c’est inévitablement un moment de grâce auquel le livre nous convie. Et le vôtre s’y inscrit, à l’image de ces opuscules qui, de prime abord, peuvent paraître sans importance, mais dont il reste pour longtemps la sensation d’un « toujours là ». »



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